Rebondissant sur le courrier du Français Vichenou Cleber qui racontait le mois dernier comment les services d’immigration de Jakarta lui avait refusé l’accès au territoire sans raison si ce n’est un évident délit de faciès, un lecteur nous fait part ce mois-ci de son expérience à Kalimantan lorsque des policiers locaux s’étaient mis en tête de l’arrêter, le soupçonnant d’être le terroriste islamiste français Frédéric Jean Salvi.
Le courrier relatant la mésaventure d'un français refoulé à la frontière indonésienne à Jakarta a d'abord été publié sur un forum de voyage francophone. Les quelques internautes ayant réagi à cette histoire ont déploré le comportement hostile des officiers de l'immigration tout en affirmant cependant que ceux-ci étaient malheureusement dans leur bon droit et n'avaient enfreint aucune espèce de règlement.
Si cela est peut-être vrai dans le cas présent (les experts répondront à ma place), et si la corruption qui concerne le plus directement les expatriés est à mille lieues d'être éradiquée, il faut néanmoins souligner que contrairement à une idée répandue, l'impunité n'est pas totale.
En août 2010, j'ai été « interpellé » par la police locale du village de mon épouse, au fin fond du Kalimantan. Motif : mon signalement ressemblait fortement, dixit le chef de la police, à celui d'un islamiste français alors recherché pour actes de terrorisme sur le territoire indonésien (F. J. Salvi) ; même prénom (Frédéric), même taille (grand) et portant également des lunettes !
Convaincus de la mauvaise foi de nos interlocuteurs, mon épouse et moi avons été, après les pourparlers ordinaires, jusqu'à les mettre au défi de nous empêcher physiquement de quitter le village. Excédé, je finis même par arracher mon passeport biométrique flambant neuf (dont l'authenticité était là aussi mise en doute) des mains d'un des policiers. Talonnés par leur 4x4, nous arrivâmes finalement en ville au terme d'un voyage angoissant. A l'aéroport, je passai un coup de fil à l'ambassade de France. On me conseilla, tant que je n'étais pas officiellement placé en état d'arrestation, de poursuivre mon voyage comme si de rien n'était (cette stratégie s'avéra... payante !), tout en soulignant que « dans les cas comme celui-ci » - ah bon, il y en a d'autres ?- la police avait effectivement le droit de m'appréhender pour procéder à des vérifications. Sous-entendu, à cette époque, la police était en droit d'arrêter tous les Français costauds à lunettes (même si Salvi, dont le portrait était visible sur Google Images, n'en portait pas !) et de les enfermer pendant deux jours et deux nuits pour procéder à des vérifications dont on imagine d'ici le très grand professionnalisme.
Mais la vérité était un peu plus nuancée. Un complice au sein de la police locale m'assura que si j'avais alors raconté mon histoire aux services adéquats, le responsable de ces désagréments qui me furent occasionnés aurait pu avoir de gros ennuis et finir par être muté... Confirmant ses dires, de nombreux Indonésiens acquis à ma cause me conseillèrent de « lapor » (déposer) et de « tuntut » (attaquer en justice), des termes dont l'emploi de plus en plus fréquent montre bien le ras-le-bol de la population du cru face à ce type de pratiques...
Comme quoi, face à l'immigration, à la police et à toutes ces administrations gangrénées par d'innombrables « kambing hitam » (brebis galeuses), il existe des moyens d'action légaux. Le tout, et ce n'est pas une mince affaire, étant de savoir actionner les bons leviers. Une idée de futur article pour La Gazette ? ....
Frédéric, Java.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire