Tribulation d'un pigeon voyageur
Cette fois, toujours dans le registre des arnaques à Bali, un texte fort bien écrit et amusant (rire jaune quand même !) sous le titre « Tribulation d’un pigeon voyageur ». Notre touriste y passe en revue toutes les escroqueries minables dont les nouveaux visiteurs sont encore et toujours les victimes. A l’heure où les autorités du tourisme et autres marchands de rêves font de plus en plus la promo d’un Bali de pur fantasme, retour à la triste réalité !
Bali, c’est beau, tu verras, les plages, les rizières… Ce qui me fut cru fut fait ! En arrivant à Bali chaudement démoulé de l’avion, j’emmenais mes courbatures à Kuta. En arrivant là, un peu effrayé, je dis au chauffeur du taxi de continuer plus loin afin de m’enfuir de cet enfer grouillant, mais il refusa vu les embouteillages bloquant toutes initiatives d’espoir d’en sortir. J’allais donc à pied vers Legian tout aussi rempli sans discontinuation de bars et boutiques, de vendeurs de babioles unilatérales estampillées « tourist only ». Ici la fraude aux copies de marques n’est pas du tout scandaleuse comme ailleurs, montres, sacs, vêtements, etc. S’habiller en vulgaire nouveau riche comme au paradis donne l’embarras du choix à la portée de toutes les bourses.
Quelle ne fut ma déception ensuite, que dans cette mer vantée partout, on ne nage pas, et il faut s’installer avec les nombreux autres dans la procession de vendeurs-masseurs-ouvreurs de noix de cocos - qu’il y a longtemps qu’ils ne boivent plus eux-mêmes, laissant cette exotique remplissage d’estomac aux touristes - pour regarder les intrépides surfeurs affronter les assauts des vagues. Bali c’est beau tu verras… Plus tard, je me retrouve à Sanur, j’y loue une moto avec casque mais voyant que personne ou presque ne le porte, je me risque un jour de faire les 50 mètres qui me séparent de la plage, non couvert (plage où nager est encore moins probable, pour cause de peu d’eau). Un policier à moto m’ayant repéré à ma couleur étrangère, me rattrape et me réclame 500 000 roupies pour absence de casque ! Rien à faire et il faut payer de suite. A voir les autres, un simple petit foulard noué à l’Indonésienne aurait suffi, ou rien du tout comme la plupart des Balinais. C’est râlant mais bon, si la tranquillité d’esprit est à ce prix, je paie. Et le voilà qui enfourche sa moto et, sans un adieu, il s’en va avec mes sous dans sa poche, me laissant déçu et sans reçu. C’est encore plus râlant. Pour m’en remettre, je me dis que son karma lui revaudra bien ça. Bali, c’est beau, tu verras…
Avec des amis, nous avons programmé une belle excursion au mont Batur. Départ à 4 heures du matin pour arriver à temps pour y voir, du sommet, le lever du soleil. L’arrivée à pied d’œuvre au parking de départ pour l’assaut final fut épique. Prendre un guide désigné et certifié HPPGB est obligatoire, on se demande vraiment pourquoi car il s’agit d’un sentier de randonnée à suivre. Le chauffeur du taxi qui nous a emmenés ne veut pas que nous descendions avant qu’il ne soit allé parler aux guides « officiels » et leur payer notre passage. Sentant le bizarre, pas question, je vais avec lui, les guides essaient de m’empêcher d’entrer dans le bureau de tickets et me dirigent presque de force dans une autre pièce pour me montrer une image du chemin à faire. Pour le guide, on me réclame 250 000 Rp. Aucun tarif affiché ni tickets ! C’est le prix quel que soit le nombre de personnes soit un million pour quatre. Nous avions l’intention de prendre un autre sentier renseigné dans les guides, mais on nous prétend que c’est interdit car endommagé (étonnant non). Finalement, je préfère payer pour acheter notre tranquillité, plutôt que de s’énerver avant le jour qui pointe et râler ensuite. Cela sans tickets ni reçu. Bali, c’est beau, tu verras… Mais le plaisir de marcher dans ce chemin difficile par moment est bien vite gâché par ce guide qui s’impatiente quand l’on s’arrête pour déguster le paysage ou se reposer un peu dans cette belle nature mystérieuse et dramatique. Il semble pressé d’en avoir fini de ce bête chemin avec ces bêtes touristes pour aller chercher les clients suivants. Essayer de lui faire comprendre que nous avons envie de flâner rend la situation peu sympathique, une amie ne voulant suivre ce rythme, décide de s’arrêter et de nous attendre pour la descente. Nous avons bien vu ce beau lever du soleil mais sur fond de pensées ravageuses, il est difficile d’avoir les yeux des premiers jours se levant sur ce panorama d’immense cratère brumeux avec au loin le grand lac se réveillant dans cette fin de nuit d’ombres. Moment fort devant ce puissant phénomène : un volcan. Ceci écrit après coup pour faire joli, car avoir ces pensées contemplatives avec ce guide qui piétine en nous parlant de redescendre, ce que nous fîmes docilement pour en avoir fini de cette randonnée à un million, donné à cette mafia et au gentil taximan qui n’était qu’un truand nous ayant pris en otages dans sa nasse.
Je ne parlerai pas de la visite du temple de Besakih, car là, heureusement, c’est écrit dans tous les bons guides de ne pas y aller. J’ai risqué et suis allé à moto. Je n’ai pas payé la fausse redevance sur la route, ni le parking, ni un ticket d’entrée, ni le guide obligatoire, ni l’enfant qu’on a envoyé me suivre et à qui j’ai demandé de s’en aller, ni le droit de prier et me faire imposer une cérémonie payante, ni le droit d’aller partout où il me plaisait, alors que c’est mensongèrement interdit, ni loué un sarong pour le respect des lieux qu’ils profanent, ni donné d’argent aux enfants à qui l’on apprend à mendier soi-disant pour l’école. On dirait une invasion de moustiques, entourée de chiens aboyant pour finir par les mouches sur la merde touristique. Bali, c’est beau, tu verras…
Quelques jours plus tard en rendant la moto au loueur, par honnêteté, je fais remarquer une griffe dans le plastique de la carrosserie qui fut faite dans un parking en mon absence (moto tombée sans doute). Il revient plus tard à mon hôtel pour me réclamer sans preuves 1 200 000 Rp pour remplacer la pièce car il a téléphoné à l’importateur, impossible de la repeindre etc. Et voilà il veut du cash ce soir car je m’en allais le lendemain. A nouveau, j’ai pensé à ma tranquillité de vacancier, et ne voulant pas partir avec une conscience de voleur, je les lui ai donné.
L’industrie touristique est une manne florissante. Il est dommage que le voyageur soit principalement au contact de ces arnaqueurs anarchiques, avides de plumer des pigeons voyageurs en les apostrophant vulgairement à tous les coins de rue comme des pêcheurs affamés. Sans souci de dégrader et saboter les efforts que certains mettent naturellement à être agréables aux visiteurs qui aiment leur pays. Bali, c’est beau, tu verras… les gens ont tous le sourire,
sauf parfois quelques touristes…
Louis Claus
La première vague payante du monde
Sous le titre « La première vague payante au monde », un surfeur nous fait part de son indignation devant la tentative du banjar qui gère la plage de Batubolong d’imposer un droit d’entrée pour accéder aux vagues. Un autre courrier en anglais sur le même sujet est sur notre site internet.
Une île à la dérive
La dérive touristique entamée depuis deux décennies sur l’île de Bali ne s’arrête pas, bien au contraire. Depuis hier matin sur la plage de Oldman-Batubolong située au sud de l’île de Bali, paradis des surfeurs, « un péage à vague » a été mis en place. Il y a encore deux jours, le parking coutait 1000 rupiah. Aujourd’hui, pour rentrer sur le site, vous devez désormais vous acquitter d’un droit d’entrée de 5000 rupiah pour garer votre véhicule et de 5000 autres rupiah si vous désirez « profiter des vagues », « menikmati ombak » en indonésien. Si vous arrivez à pied avec votre planche sous le bras, il vous en coûtera donc quand même 5000 rupiah. Prix qui ne varie pas encore selon la taille des vagues mais au rythme où vont les choses, on peut s’attendre au pire.
Morosité matinale
A l’origine de cette surprenante mesure, le banjar, entité traditionnelle de base à Bali qui règle les affaires de la communauté de quartier. Il est constitué d’un membre de chaque famille et d’un chef élu démocratiquement par les membres du village. Ce dernier pouvant être révoqué à tout moment. Généralement, les décisions sont prises en réunion mais vraisemblablement celle-ci a échappé à la règle comme en témoigne à demi-mot un des deux loueurs de planches, qui a instantanément subi de plein fouet les répercussions d’une telle mesure. La mine fermée, ce qui est très rare pour un Balinais lorsqu’il s’adresse à un touriste, il s’étonne non seulement que l’on puisse faire payer une vague mais également, et ce sans considération d’ordre éthique, que le prix ait décuplé. La vague de « Oldman » déroule, comme son nom l’indique, assez tranquillement. La location de planche, sur ce site accessible à tous les niveaux, fonctionne bien. Aujourd’hui, la fréquentation était réduite du tiers. Les surfeurs à l’eau qui ont payé la taxe sont également abasourdis par une telle mesure. S’il restait le tiers des surfeurs aujourd’hui, il risque de n’en rester que le quart demain.
Maladresse ou nouveau tournant ?
Les employés du péage ont également du mal à justifier une telle mesure. Les raisons avancées sont multiples, changeantes et parfois surprenantes. Ils évoquent parfois la prise en charge du coût du nettoyage de la plage, le fait de profiter de la vague comme d’un monument payant ou plus étonnant encore, un alignement commercial avec les vagues déjà payantes dans certains pays.
Que le banjar veuille ainsi profiter un peu de l’argent généré par le tourisme est une chose et personne ne peut vraiment lui en vouloir. Mais la recherche systématique du profit n’autorise pas à tout et n’importe quoi. Les côtes ont déjà été saccagées par les investisseurs et leurs hôtels, et la pollution est un problème catastrophique et irrésolu. Si l’état d’esprit balinais continuait à se dégrader comme son littoral, l’île prendrait vraiment un virage dangereux. Espérons seulement que cette idée maladroite ne fera pas d’émule, qu’elle sera vite oubliée et enterrée profondément sous le sable. La mer reviendra alors à ceux à qui elle appartient, c’est à dire à tout le monde.
Puis il nous fait part de la suite de l’histoire dans un deuxième courrier…
Réunion de crise
Heureusement, les mesures saugrenues ne sont pas toujours toutes définitives. Celle de faire payer pour avoir le droit de surfer en fait partie, en tout cas jusqu’à nouvel ordre. En effet, le mécontentement fut tel qu’une seule petite journée suffit à rendre la plage et le spot de surf de Batubolong quasiment déserts. Conscients du manque à gagner qui allait toucher le banjar lui-même, l’ensemble des vendeurs de souvenirs, les loueurs de planche et les petits restaurants, une réunion se tint précipitamment le vendredi 3 août au soir entre les membres de la communauté. La suspension du péage y fut votée.
Le banjar devrait se réunir dans la journée de lundi afin de procéder à un remaniement de cette mesure. Le tarif d’entrée sur le site devrait être revu à la baisse et l’explication commerciale de ce droit d’accès ne devrait plus reposer sur le droit de profiter des vagues mais sur d’autres points qui sont encore à définir. Mais si, le samedi 4 août, la barrière du péage était bien levée, le drapeau blanc, lui, n’était pas hissé par tout le monde. Les réactions des membres du banjar sont partagées. Quand l’un vous invite amicalement à la nouvelle réunion, l’autre, veste militaire sur le dos, vous demande avec un sourire forcé comment vous êtes au courant de cette information. Certains sont visiblement agacés de devoir faire marche arrière et le molosse tatoué qui surgit derrière moi en me tapotant l’épaule, était aussi, selon toute vraisemblance, de cet avis. Nous en saurons plus lundi ou mardi.
Mathieu Sechet
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